En cette deuxième décennie du 21è siècle, la question sur les origines du peuplement de Madagascar et du Malgache reste d’actualité. Sur un tout autre plan, l’élection d’Ahmad à la tête de la Confédération africaine de football confère à cette instance une importance jusqu’ici secondaire.
Origines – Malgache, qui es-tu ?
Le temps viendra-t-il où l’on pourra enfin répondre à cette question ? J’ai eu l’avantage d’échanger quelques mots à ce sujet avec Jean-Pierre Domenichini, lors d’un…concert de jazz en hommage à Andy Razaf, dans la cour du Palais de la Reine. S’en souvient-il Il m’a, par la suite, aimablement envoyé par mail la version finale de son « Le peuplement de Madagascar : Des migrations et origines mythiques aux réalités de l’histoire ». Mankasitraka, zoky raiamandreny hajaina ! Il est tout simplement impossible de résumer en quelques lignes un article qui ne fait que passer, cette somme de recherches et de réflexions d’une personnalité qui a consacré tout son savoir à sa terre d’adoption. Qu’il me permette de reprendre quelques-uns des mythes et dérives que lui-même a relevés, et qui nous éloignent plus qu’autre chose de la vérité historique et du réel de ce peuple.
Dans son ouvrage intitulé « Le peuplement de Madagascar : Des migrations et origines mythiquesaux réalités de l’histoire », Jean-Pierre Domenichini mentionne quelques mythes sur l’origine du Malgache.
C’est le cas des « mythistoires » traitant de la création de l’homme et de la femme, pour ne citer que le mythe de « Ietse et de Ievelo » en pays sakalava. Les Vazimba, pour leur part et selon la tradition betsileo rapportée par le pasteur Jessé Rainifihina, ne seraient que les premiers arrivés des vagues de migrants, et n’auraient pas de traits physiques particuliers. Les vrais Protomalgaches, par contre ,auraient été là depuis toujours, se vêtaient d’écorces d’arbres, et s’appelaient Taimbalibaly, Gola, et autres Fonoka. L’enfance d’une humanité n’ayant pas encore atteint l’âge de la raison, en quelque sorte. Et que dire des linguistes comme le jésuite Jean-Baptiste Razafintsalama qui signera plus tard Dama-Tsoha, la sanscritiste Solange Thierry, ou le lazariste Joseph Briant, plus préoccupés par l’extension de l’influence arabe et musulmane Une certaine intelligentsia tananarivienne milite corps et âme aujourd’hui pour « la thèse juive ». Le jardin d’Eden était situé en Imerina, et c’est de là que Noé partit pour le Mont Ararat… La majorité des noms de villages, cités, montagnes, vallées et peuples de Madagascar ont des racines juives… Une « fouthèse » comme dirait Marc Spindler, professeur de théologie et grand connaisseur de Madagascar
Le « lakambezo » a un équivalent en Austronésie.
Hermétisme frileuxToujours est-il que cette position est reprise depuis 2004 par la « Trano koltoraly malagasy » qui veut donner une identité judéo-chrétienne au peuple et à la nation malgache. Annonçant la sortie d’Égypte, le Seigneur dit à Moïse et à Aaron : « le mois actuel devra marquer pour vous le début de l’année, ce sera le premier mois » (Exode 12 :2). Ce mois étant le premier du printemps dans l’hémisphère Nord, pour les « koultouralistes » le Nouvel An malgache sera donc, selon les années, à la nouvelle lune de la fin mars ou du début avril. On y est presque !Mon ami Rakotomala était, pour sa part, dessinateur industriel dans les bureaux d’études de la Société nationale des industries aéronautiques et spatiales ( SNIAS ), puis des Avions Marcel Dassault, avant de courir le monde, des Amériques du Nord et du Sud à l’Asie du Sud et de l’Est, et de se retrouver sur les traces de ses ancêtres dans le sillage de la pirogue à balancier. Devenu un spécialiste des pirogues traditionnelles, il a beaucoup écrit, sous des angles à la fois techniques, culturels, et ethnographiques, sur cette embarcation qu’est le « lakambezo », à laquelle il a trouvé de très proches parents dans toute l’Austronésie.Madagascar ayant été un pays de grandes migrations, depuis la nuit des temps, cela serait-il une hérésie ou une haute trahison de souhaiter qu’il le redevienne, mais d’une manière pensée, sans rapport aucun avec les houles prédatrices chinoises actuelles Et si, à la place d’un hermétisme frileux, son meilleur devenir était d’être le Canada de l’océan Indien La question mérite d’être posée, car comme l’écrivait, il n’y a pas si longtemps, Béchir Ben Yahmed de Jeune Afrique : « Le Canada et les Canadiens ont compris que leur pays et son économie s’enrichissent de l’apport des migrants. Ils donnent certes la préférence aux mieux éduqués et à ceux dont leur pays a le plus besoin. Mais ils veulent une société multiculturelle fondée sur la diversité, et s’en trouvent très bien. Leurs performances socioéconomiques les placent au premier rang de tous les pays développés. Il arrive, disait le général De Gaulle, qu’une bonne action soit en même temps une bonne affaire… »
Les performances de l’athlète jamaïcain Usain Bolt sont extraordinaires.
Performances – Dieux du stade sans l’avoir cherché
Cette jeune fille de 14 ans s’est alignée au départ d’un Trail de cinq kilomètres comportant 600 mètres de dénivelé juste pour s’amuser, sans avoir suivi un entraînement particulier. Pourtant, elle constata que de nombreux coureurs finissaient par marcher au pas dans la montée, alors qu’elle ne ressentait aucune fatigue particulière. Plus tard, elle devint une athlète olympique et participa aux championnats du monde de ski de fond en 2015 : elle avait tout simplement un avantage biologique qui lui a permis de devenir une des meilleures athlètes du monde dans sa spécialité.Il suffit, semble-t-il, d’un simple gène. Un parmi les 20 à 25 000 qui contrôlent le développement des 30 000 milliards de cellules du corps humain. Euan Ashley, chercheur à l’université Stanford en Écosse, tente de percer ce mystère qui donne à certaines personnes des capacités physiques hors du commun, dans le but de pouvoir mettre au point des traitements pour les maladies cardiovasculaires, notamment. Dans son laboratoire, il sélectionne les athlètes sur la base d’une unique variable physiologique : leur consommation maximale d’oxygène ou VO2max. Cette valeur est considérée comme l’un des meilleurs indicateurs de la performance sportive, et de l’état de santé des individus. Il commença son étude en 2001, à l’occasion de l’« Adrenaline Rush », une course d’endurance extrême de plusieurs jours, sur une distance de 480k m. Il s’attendait à des données physiologiques ahurissantes, mais, chez certains athlètes, strictement rien : « leurs fonctions passaient de la normale à un niveau un tout petit peu plus élevé ».Eero Mäntyranta, champion de ski finlandais, remporta sept médailles olympiques en quatre participations. On le soupçonna de dopage, à tort : il n’avait jamais triché, mais possédait une mutation génétique au niveau d’un récepteur chargé du contrôle et de la production des globules rouges dans le sang. « C’est comme s’il possédait un accélérateur dans sa production de globules rouges. Sur le plan génétique, c’était un superman ».L’objectif de l’équipe de Ashley est, en fait, d’étudier les organismes les plus performants au monde afin d’aider les plus déficients, et peut-être aussi ceux d’entre les deux. Elle s’intéresse en priorité au cœur, mais recherche des mutations dans tout le génome. Mais ne croyons surtout pas que les meilleurs sportifs de la planète sont ceux qui jouissent de la meilleure santé ! Certaines études montrent qu’être un athlète olympique n’est pas une garantie de longévité, par rapport à celui qui pratique un sport en tant que simple loisir. Être Usain Bolt rapporte gros, mais cela peut aussi avoir un coût…
La Confédération africaine de football a été créée en 1957.
CAF – On n’a pas tous les jours soixante ans
L’instance suprême du football africain fête ses soixante ans, et s’offre le cadeau le plus inattendu qu’on puisse imaginer : un président tout neuf venu d’un pays qui n’a jamais atteint le ventre mou du classement continental sauf durant la parenthèse Schnittger. Il sera toujours temps, plus tard, de se féliciter, ou au contraire de regretter ce choix. À la limite, on pourrait dire que le patronyme du challenger, sonnant à la fois africain et musulman, a contribué à mettre en confiance des électeurs souvent soupçonneux devant notre insularité. L’expression « africain ET malgache » n’a-t-elle pas longtemps été de mise, et n’est-elle pas toujours présente dans les subconscients Issa ou Ahmad, par contre, c’est du pareil au même, contrairement aux noms kilométriques si difficiles à prononcer, et à retenir.Ceci étant, c’est avec plaisir que nous feuilletons le livre de Berthin Andriamiharinosy (tiens, v’là un de ces noms kilométriques…) intitulé « Football quand tu nous tiens », pour mieux faire connaissance avec cette Confédération à laquelle nous appartenons un peu plus depuis le 16 mars dernier. Ils étaient trois membres fondateurs, à savoir l’Éthiopien Ato Tessema, l’Égyptien Abdelaziz Abdallah Salem, et le Soudanais Abed Mohamed. Une ombre persistait pourtant déjà en ce moment-là : la politique d’apartheid d’une Afrique du Sud qui bénéficiait de la sympathie d’un certain nombre de membres de la FIFA. La première victoire de la CAF dans ce bras-de-fer sera la suspension de ce pays des tournois et championnats organisés par la CAF et la FIFA, suivie de son exclusion en 1976.Les péchés de jeunesse ne manquèrent pas au sein de la CAF. Tantôt les règlements paraissaient rigides ou inadaptés face aux nouvelles situations politiques, tantôt on sentait, au contraire ,qu’une stabilité de l’ordre établi était nécessaire. Certaines nations de football versaient dans un nationalisme mal placé, entravant le développement harmonieux de tout le football africain.Les fameuses deux places en Coupe du Monde ne furent acquises qu’en 1982 en Espagne, donnant l’occasion à l’Algérie et au Cameroun de réaliser de véritables prouesses. En 1985, les cadets du Nigeria décrochaient le titre de Champions du Monde. En 1986, le Maroc parvenait au deuxième tour du Mondial, surclassant des pays européens et sud-américains riches en palmarès.
Le grand footballeur ghanéen Abedi Pele entourédes ex-présidents respectifs de la CAF, Issa Hayatou (à g.), et de la FIFA, Sepp Blatter.
Perles africainesOn prenait enfin l’Afrique au sérieux, et en 1989 étaient organisées durant la même année, la XVIè édition de la CAN, la Coupe d’Afrique des Clubs Champions, celle des vainqueurs de Coupe, ainsi que la CAN des juniors et des cadets. Les recruteurs européens se bousculaient pour détecter et acheter les perles africaines, parfois à un prix dérisoire.Les relations entre Madagascar et la CAF La Grande île participait aux différentes Coupes continentales sans discontinuité et sans le moindre succès. Elle payait ses cotisations, mais pendant longtemps, aucun responsable du football malgache n’a siégé au sein du Comité exécutif, véritable propriété privée de certains pays. On était si loin, et nos noms étaient si longs ! Quand Issa Hayatou étrenna ses trente ans de règne sans partage, il était épaulé à la première vice-Présidence par l’Égypte, et à la tête des différentes zones par la Tunisie, la minuscule Gambie, le Congo, la Tanzanie, la Somalie, et le Botswana. De Madagascar, point. Un inconnu malgré le nombre toujours croissant de ses licenciés, certainement plus important que celui du Botswana (zone Sud), ou de la Tanzanie et de la Somalie (zone Centre-Est).Et puis Zorro est arrivé, quand bien même il n’ait jamais été prophète en son pays. La balle est décidément ronde…
Rétro pêle-mêle
L’Archipel des sultans batailleurs a de la peine à faire sa mue. Anjouan, l’île frondeuse en crise ouverte avec le pouvoir fédéral, n’est pas « terra incognita » pour les Malgaches. C’est là que le prince Ramanetaka trouva refuge quand Ranavalona 1ère assit son pouvoir en exterminant une bonne partie de sa propre famille. C’est là aussi que des membres du MDRM connurent l’exil après les grands procès qui suivirent les évènements de 1947. L’île compte une colonie malgache expatriée relativement prospère, sans oublier la forte proportion d’Anjouanais de souche malgache depuis des générations.En ce mois de février 2008, le président Abdallah Sambi ne cache plus son intention de recourir à la force pour restaurer l’intégrité de l’État comorien, et ce en neutralisant le colonel rebelle Mohamed Bacar. La presse est préparée à une très prochaine intervention militaire, et est invitée à faire preuve d’objectivité. L’île voisine de Mohéli est transformée en base arrière en hommes et en munitions. Mais l’impatience du Président Sambi est tempérée par l’Union africaine qui s’octroie deux mois supplémentaires pour permettre au groupe de contact conduit par l’Afrique du Sud d’épuiser tous les recours pacifiques. Dans ce groupe figurent la Tanzanie, la Libye, le Sénégal, et même le Soudan décrié par la communauté internationale. Par contre, le pays le plus proche des Comores géographiquement, historiquement, et culturellement parlant qu’est Madagascar a superbement été oublié. Faut-il interpréter cette omission comme un échec d’une diplomatie malgache toujours trop prompte à s’encenser ?
Textes : Tom AndriamanoroPhotos : L’Express de Madagascar – AFP – Fournies